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Hélicoptères lourds: les députés séduits par un « Évreux inversé »

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Un hélicoptère de transport lourd CH-53G de l'armée de l'Air allemande (Crédit: Bundeswehr)

Un hélicoptère de transport lourd CH-53G de l’armée de l’Air allemande (Crédit: Bundeswehr)


 
Suggéré dès l’an dernier par le CEMAA, le général Philippe Lavigne, le scénario d’une unité franco-allemande d’hélicoptères de transport lourd est depuis devenu un point de vigilance pour les députés de la Commission de la défense nationale et des forces armées. Certains préconisent désormais de surfer sur la vague du futur escadron de transport tactique binational basé à Évreux pour reproduire le même schéma au profit des hélicoptères.
 
L’unité franco-allemande de la BA 105 d’Évreux opérera une flotte combinée de dix C-130J, dont cinq KC-130J dotés d’une capacité de ravitaillement en vol. Un premier détachement allemand est attendu en avril 2021, avant une montée en puissance progressive jusqu’en 2024 et l’arrivée des derniers aéronefs acquis par l’Allemagne. Hormis la construction de cette capacité commune, « ce projet me semble par ailleurs porteur de plus larges promesses, » pointait récemment la députée LREM Séverine Gipson dans un rapport pour avis sur la coopération franco-allemande dans le domaine du transport tactique aérien.
 
Entre autres axes de développement, la rapporteure préconise le lancement d’autres coopérations opérationnelles, dont celle des hélicoptères de transport lourd. Initiateur de l’idée, le général Lavigne rappelait en effet il y peu « tout le bénéfice des hélicoptères de transport lourd (HTL) dans le cadre de l’opération Barkhane, où nos amis britanniques ont prolongé l’engagement de leurs trois hélicoptères jusqu’à l’été 2020. En liaison avec des partenaires comme l’Allemagne, le Canada et le Royaume-Uni, nous examinons la possibilité de former des pilotes et réfléchissons en parallèle à la location de ce type de capacité ».
 
L’adoption de cet accord bilatéral sur le transport tactique pourrait finalement être le « tremplin » espéré pour d’autres rapprochements opérationnels, souhaitent les députés. À commencer par Jean-Jacques Ferrara (LR), selon qui « la meilleure façon de soutenir cette éventualité est par conséquent de faire en sorte que l’escadron franco-allemand d’Évreux voie le jour et fonctionne de la meilleure façon possible ». Du soutien d’une poignée de parlementaires, certes parmi les plus avisés sur la question, à la matérialisation d’un « Évreux inversé » avec le partenaire allemand, le pas à franchir est évidemment immense et maintenir ce cap jusqu’à l’ajout d’une ligne lors de l’actualisation de la LPM en 2021 sera déjà un exploit.
 
Année charnière, 2021 concordera par ailleurs avec la signature, selon les plans établis aujourd’hui par Berlin, du contrat STH (Schwerer Transporthubscrauber). Doté d’un budget prévisionnel de 5,6Md€, ce programme vise au remplacement de la flotte allemande de CH-53G/GS/GA pour 40 à 60 nouveaux hélicoptères lourds. Une compétition dans laquelle s’affrontent le CH-47F de Boeing et le CH-53K de Sikorsky. À l’instar de l’acquisition par l’Allemagne et la France de C-130J, la conclusion du contrat STH pourrait ouvrir une seconde fenêtre d’opportunité pour la constitution d’une unité commune, cette fois sur le sol allemand. Pour un budget maîtrisé – l’unité bilatérale d’Évreux coûtera 110M€ à la France -, les pilotes de l’armée de l’Air ou de l’ALAT disposeraient d’outils de formation et d’entraînement à distance respectable du territoire français. Ce à quoi il faudra rajouter la location, privilégiée par le CEMAA, ou l’achat, beaucoup plus hypothétique, des plateformes.
 
Le projet mené à Évreux ouvre certes un créneau avec l’Allemagne, « mais nous pourrions également envisager un partenariat avec d’autres pays, » rappelle la rapporteure. Un rapprochement avec le Royaume-Uni, tout d’abord, trouverait tout son sens au vu de l’engagement réussi des CH-47 anglais en soutien de l’opération Barkhane, qui se prolongera au moins jusqu’en 2020. Le Canada, ensuite, dispose aussi d’une expérience profitable en matière de transport lourd, dans des conditions relativement proches de celles vécues par le contingent britannique déployé sur Barkhane. Entre juillet 2018 et juillet 2019, trois CH-147F canadiens ont ainsi réalisé une centaine de missions au profit de la MINUSMA, transportant près de 2800 passagers et 168 tonnes de fret au cours de 4000 heures de vol.
 
L’actualisation de la LPM, c’est dans deux ans, c’est presque demain. Dans l’intervalle, les CH-47 britanniques auront peut-être quitté l’opération Barkhane sans être remplacés, tandis que l’escadron binational d’Évreux aura reçu tous ses avions français et le premier appareil allemand, deux éléments permettant de consolider l’argumentaire nécessaire à la constitution d’une structure identique pour les hélicoptères. « C’est donc une affaire à suivre…, » conclut très justement Mme Gipson.

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