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Accélérer Scorpion ou rénover le VAB ?

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Doubler la cadence de production du véhicule Griffon, développé dans le cadre du programme Scorpion de modernisation pour l’armée de terre française, ne provoquerait qu’un surcoût annuel de 27M€.
 

Le premier prototype de VBMR Griffon présenté à Satory en juillet 2017

Le premier prototype de VBMR Griffon présenté à Satory en juillet 2017


 
C’est l’avis, en tout cas, du député de la majorité présidentielle La République en Marche (LREM), Thomas Gassilloud, rapporteur pour avis des crédits alloués aux forces terrestres au sein de la Commission de la Défense nationale et des Forces armées de l’Assemblée nationale. « Accélérer Scorpion, c’est anticiper une dépense par ailleurs programmée, tandis que régénérer des VAB, c’est consentir des dépenses supplémentaires sans économie postérieure en contrepartie », argumente Gassilloud.
 
Véritable secret de polichinelle, l’obsolescence du segment médian des blindés français sera certainement au cœur de la prochaine Loi de programmation militaire. D’après Gassilloud, celle-ci devra impérativement statuer sur les deux seuls scénarios envisageables : soit prolonger – encore et encore – la durée de vie des VAB en modifiant un nombre plus important au standard Ultima, soit accélérer les livraisons de plateformes Scorpion. Pour le député LREM, le choix est clair : « les circonstances […] plaident en faveur d’une accélération du programme Scorpion ». Explications.
 
Développé avec pour objectif de constituer un « parc tampon » en attendant Scorpion, le standard Ultima n’a pour l’heure profité qu’à 290 des 2 661 VAB du parc français. Selon l’Etat major de l’armée de Terre (EMAT), l’intensité croissante des menaces en opération extérieure nécessite de moderniser jusqu’à 460 VAB supplémentaires à l’horizon 2025, dont 240 pour l’infanterie et le génie et 220 d’autres versions. De même, toute logique de modernisation nécessitera l’ajout de systèmes futurs, dont la radio Contact, et donc l’intégration des véhicules à la « bulle Scorpion ». Un scénario coûteux, estimé à 334M€ pour les VAB Infanterie/Génie, soit un coût unitaire de 1,4M€.
 
L’option Scorpion repose quant à elle sur la capacité industrielle des membres du GME Scorpion (Thales, Nexter et Renault Trucks Defense) et de leurs sous-traitants à augmenter la cadence des lignes de production. D’après Gassilloud, cette hypothèse permettrait aux forces terrestres de disposer à l’horizon 2025 de 1 310 Griffon au lieu de 800 et de 143 Jaguar au lieu des 110 prévus. Or, selon les calculs de l’EMAT, le prix prévisionnel du Griffon est resté stable, à 1,5M€ en moyenne. L’écart de prix entre la production d’un Griffon et la régénération d’un VAB ne s’élève donc « qu’à » 6,7%. En tenant compte des coûts de maintien en condition opérationnel (MCO) et des durées d’amortissement, « la possession d’un Griffon est plus économique que celle d’un VAB modernisé », rappelle Gassilloud. En effet, l’entretien du premier coûterait 156 600€ par an contre 183 200€ pour un VAB.
 
In fine, doubler la cadence de production du Griffon coûterait au total 680M€. Soit 188M€ de plus que la régénération des VAB, ou un surcoût annuel inférieur à 27M€ pour la période envisagée. Un écart net, certes, mais que Gassilloud juge peu « au regard de l’accroissement annoncé des crédits du ministère des Armées » d’ici 2025. Un écart d’autant plus négligeable que « la plus-value opérationnelle des Griffon et Jaguar est indéniable », conclut Gassilloud. Reste à intégrer cette réflexion dans la logique de la future loi de programmation militaire.
 
Côté GME Scorpion, l’on se dit depuis un moment en mesure de doubler les cadences pour parvenir au rythme de 220 Griffon et « une cinquantaine » de Jaguar produits à l’année, confirmait en juillet dernier Stéphane Mayer, PDG de Nexter et président du GICAT. Gassiloud estime néanmoins que l’augmentation des cadences exposerait les industriels à un double risque.
 
Premièrement, l’augmentation des cadences suppose « des investissements en infrastructures comme en ressources humaines ainsi qu’un recours accru à la sous-traitance et des transferts de charge entre établissements d’un même groupe », explique Gassilloud. En outre, accélérer les livraisons expose les industriels au risque d’un « effet de falaise », autrement dit un effondrement brusque de la charge d’activité.
 
Un pari risqué donc, que l’industrie française peut remporter en misant dés maintenant sur les marchés à l’exportation, avec le soutien de l’État. À ce titre, le projet de « Scorpion belge » actuellement en cours de négociation pourrait amener un effet d’entraînement salvateur s’il se concrétise. Enfin, l’effort consenti par les industriels sera partiellement compensé par la délégation d’une part plus importante du MCO des matériels Scorpion, jusqu’à 40% selon le plan de transformation MCO-T 2025, pour les 30 ou 40 années à venir.

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