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L'armée espagnole prépare 2035

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Des milliards d’euro d’acquisition de matériel dernier cri, une réduction du format des forces, une nouvelle politique de recrutement, le tout dans le cadre de la Brigade 2035 : la ministre de la Défense espagnole, Dolores de Cospedal, a de grandes ambitions pour la Ejército de Tierra et elle compte bien faire en sorte que les budgets s’y conforment. 
 

(Ejercito de Tierra / instagram)

(Ejercito de Tierra / instagram)


 

« Compte tenu des capacités les plus nécessaires et les plus urgentes, le nouveau cycle d’investissement débutera prochainement avec sept programmes dont le coût a été estimé à 10,805 milliards d’euros. » C’est ce qu’indiquait le document préparé le 12 mars dernier par Mme Cospedal et auquel le média espagnol SER a eu accès. Sept programmes d’armement sont à lancer rapidement pour couvrir les « capacités les plus nécessaires et les plus urgentes » : le véhicule de combat sur roues 8×8, la frégate F-110, le nouvel avion de d’entrainement, le système de ravitaillement aérien MRTT , la deuxième phase pour les hélicoptères NH-90 ainsi que la modernisation de l’hélicoptère de transport CH-47 Chinook. Les soldats espagnols devront être patients, ce nouveau cycle d’investissement doit remplacer le précédent dont 20Mds€ de dépenses s’étaleront encore jusqu’à 2030.

 
Dans les prochaines semaines, le plan sera présenté au Conseil des ministres et devrait être inclus dans les budgets comme une dépense ordinaire, afin de remplir l’engagement pris avec l’OTAN par lequel l’Espagne doit monter les dépenses consacrées à la Défense à hauteur de 1,53% de son PIB d’ici 2024. Comme l’indique El Pais « c’est loin des 2% engagés au sommet allié de 2014, mais cela suppose 10 milliards de plus que le budget actuel ». D’autres organes de presse espagnole abordent déjà les problématiques budgétaires, s’attendant à une levée de bouclier de la part de certains groupes politiques, mais Cospedal compte aller au bout de son idée : à ceux qui demandent d’augmenter les retraites au détriment de la Défense elle répond qu’ils font de la « démagogie », soulignant que « l’argent n’est pas né des arbres » et que la protection était nécessaire.
 

Côté forces terrestres on est sur « l’Horizon 2035 » qui doit voir la naissance de la « Brigade 2035« , modèle d’armée futur des Espagnols. Une brigade de la Légion, « roi Alphonse XIII » basée à Viator, est chargée de préparer le terrain pour ce nouveau concept qui doit adapter les forces aux défis du futur, avec l’idée qu’elles soient équipées des dernières avancées technologiques et des outils numériques et qu’elles puissent rester en contact avec la population civile des zones de conflit. Comme le rappelle Infodefensa, l’équipement central de la brigade du futur sera le nouveau véhicule Piranha 8×8, « qui intégrera la technologie la plus avancée de l’intelligence artificielle et de la robotique » et qui devra connaître jusqu’à treize configurations différentes.

 
En effet, le JEME, chef d’État-Major de l’Armée de Terre espagnole, le général d’armée Francisco J. Varela Salas, a souligné l’importance de s’adapter à l’avenir le plus rapidement possible : « nous devons non seulement nous adapter à la concurrence, mais nous devons nous adapter pour survivre. Nous ne voulons pas qu’il nous arrive ce qui est arrivé aux dinosaures ». Dans ce sens, il a appelé la « société civile » et l’industrie à s’engager pour que soit atteint l’objectif à l’horizon 2035, défendant la création d’un « canal de communication » nécessaire à la réalisation des projets. « Nous sommes une armée inconnue de la société, et la société n’est pas consciente des menaces » avait-il indiqué aux journalistes.
 
Selon la stratégie adoptée par les responsables politiques et militaires, entre 2018 et 2035, l’armée travaillera sur quatre phases successives: la définition de la Brigade; expérimentation et R & D + i; le développement de l’industrie et le renforcement des capacités; et la transformation de la force.
 
Il y a moins d’un mois, Luis Martinez Meijide, général en charge de la planification (DIVPLA) présentait aux journalistes espagnols, la guerre du futur et sa réponse, la Brigade 2035. Il faut alors voir un champ de bataille non linéaire car on y retrouverait une menace hybride. Il faut se préparer, face à des menaces asymétriques, à combattre dans les zones urbaines et penser aux populations : « par exemple, l’une des leçons tirées de la bataille de Mossoul est la nécessité d’avoir des unités souterraines spécialisées avec des binômes homme-chien, pour détecter les explosifs ou dans les zones de glissements de terrain. À Mossoul, l’ennemi est apparu derrière les lignes après avoir utilisé les tunnels qu’ils avaient construits ».
 
Aussi, il ne faut pas oublier la possibilité d’un affrontement de haute intensité contre un ennemi technologiquement avancé sans se retrouver dépendants de la technologie future : « nous devons être prêts à retourner au combat des années 70. Les coordonnées manuelles, les codes cryptés … Nous devons maintenir les capacités dégradées que le soldat 2035 n’aura pas. Il faudra aussi leur apprendre à manipuler des cartes ou des boussoles ».
 
Sur la Brigade en elle-même, « tenant compte des limitations des ressources humaines », l’objectif est que celle-ci comprenne moins de troupes, « mais plus de puissance de combat ». Elle sera formée par trois groupes de bataillons tactiques de 400 à 500 soldats chacun, auxquels doivent être ajoutés des unités de soutien plus un quartier général.
 
Au total, la brigade comptera entre 2 600 et 2 800 soldats « et sera modulaire, ce qui permettra d’intervenir avec d’autres forces ou séparément ». Les unités seront connectées via un système de commande et de contrôle mis à jour pour optimiser toutes les informations, ce qui rappelle le programme Scorpion français, symbolisé par les nouveaux véhicules Griffon et Jaguar. Les soldats « monitorizado » seront équipés de caméras et de capteurs, pour envoyer et recevoir des données en temps réel.
 
Chaque groupe de combat « modulable » (des missions de reconnaissance aux missions d’artillerie par exemple), qui devra être autonome de cinq à sept jours, disposera d’un véhicule de commandement et de contrôle; neuf d’infanterie; deux véhicules de reconnaissance; un véhicule d’observation avancé; deux véhicules d’artillerie; et deux véhicules de patrouille. 17 véhicules dans chaque groupe de combat, jusqu’à un total de 51. De plus, la brigade disposera des véhicules de soutien suivants: deux véhicules de commandement et de contrôle et deux SRT; deux autres véhicules de guerre électronique et un RPAS; un contrôleur d’attaque terminal commun ; quatre véhicules de défense antiaérienne, un véhicule de commandement et de contrôle de l’artillerie antiaérienne; et dix véhicules logistiques.
 
Pour atteindre ce modèle d’armée, l’État-major espagnol veut transformer sa politique. Un des objectifs prioritaires est de faire repasser la moyenne d’âge en-dessous de la barre des 30 ans, et pour cela le ministère de la Défense a déjà un plan d’action qui implique d’augmenter les revenus, de faire progresser les conditions pour les militaires qui veulent rester mais aussi d’augmenter le nombre de départs. Par exemple, l’âge maximum pour entrer dans les forces armées devrait être abaissé de 29 à 25 ans.
 
Dernier point intéressant abordé par les responsables militaires espagnoles, si l’armement des forces terrestres devra sensiblement progresser pour la guerre du futur où les tanks doivent encore jouer un rôle primordial, il faut réfléchir à l’aspect humain : « les armées de l’Ouest avaient toujours travaillé pour affronter des armées similaires, mais maintenant l’important n’est pas de détruire l’ennemi mais de gagner la population civile ».

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