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FOB Interview: Patrica Adam sur la LPM (2ème partie)

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Seconde partie de l’interview avec Patricia Adam, député PS à l’Assemblée Nationale et Présidente de la Commission de la Défense Nationale et des forces armées (relire la 1ère partie ici), à propos de la Loi de Programmation Militaire (LPM) 2014-2019, actuellement en débat.

 

L’opération Serval au Mali est-elle une source d’enseignements pour les choix à venir ?

Sans aucun doute. Nous connaissions par avance nos lacunes capacitaires. Elles ne sont pas le fruit du hasard mais de choix. Lorsque les ressources sont rares, on privilégie telle ou telle capacité au détriment de telle ou telle autre. Ces décisions se font en conscience. Le déficit en moyens de transport aériens n’a surpris personne. On a aussi bien mesuré combien nous étions limités en hélicoptères de manœuvre. Nous avons redécouvert des vérités vieilles comme la guerre : je pense notamment au caractère primordial d’assurer une logistique adéquate. Par parenthèse, au vu des élongations, il faudrait se poser la question d’avoir quelques petits avions monomoteurs sur ce théâtre. Ce serait moins coûteux que d’utiliser des Puma pour transporter des charges modérées sur des distances importantes. Le besoin en maintenance serait très inférieur et la tâche des mécaniciens en serait allégée d’autant… Mais ce qui m’a le plus frappée, c’est le fait que nous nous en sommes bien sortis parce que nous avons mis ce que nous avions de meilleur, en termes de matériels. Sans Tigre, sans blindés de cavalerie, sans VBCI et sans Caesar, nous aurions eu beaucoup plus de pertes. Au moment où on parle de différenciation, je note que même dans un conflit africain, face à un ennemi asymétrique, il faut tout sortir. L’époque a bien changé par rapport au temps où  la vue de bérets amarante ou verts faisait fuir les fâcheux. Je suis heureuse que le ministre ait fait les bons choix pour Serval.

 

Aucune Loi de programmation militaire n’a été respectée à la lettre, la Défense ayant traditionnellement le rôle de « variable d’ajustement ». Le Ministre a prévu un dispositif de contrôle régulier au niveau du Conseil de Défense. Pensez-vous que cela soit suffisant ?

La défense nationale n’est plus une variable d’ajustement. Au contraire, son budget est maintenu. En tout cas, le dispositif que vous évoquez apportera des garanties sans précédent. Je n’ai pas le souvenir d’un ministre qui se batte autant que le fait Jean-Yves Le Drian. Ni qui ait une telle proximité avec le chef des armées. La défense n’obtiendra pas ce qui n’existe pas. Mais elle obtient tout ce qu’elle peut obtenir. Nous avons un excellent ministre.

 

Les auditions et débats vont débuter pour durer un mois. Quels sont, selon vous, les sujets à propos desquels les parlementaires doivent être le plus vigilants ?

On peut même parler de trois mois ! Grâce à notre travail en amont, nous avons déjà obtenu des éclaircissements et des assurances sur certains points de vigilance tels que les ressources exceptionnelles ou les hypothèses d’exportation. Il en reste d’autres sur certains programmes et sur le dispositif RH notamment. A l’inverse, nous n’avons pas trop d’inquiétudes sur le dispositif juridique, s’agissant de la cyberdéfense ou de la protection des militaires en opération, pour lesquelles la LPM apportera de vraies avancées.

 

La réforme du paiement des soldes, à travers le logiciel unique Louvois s’est avéré être un véritable fiasco qui dure encore et touche durement les soldats et leurs familles. Certains acteurs de cette réforme n’ont-ils pas fait preuve de légèreté dans la gestion de cet important dossier ?

Oui, on peut même parler de scandale ! Nous avons fait le point dernièrement lors de la présentation du rapport sur la réforme du ministère de la défense de mes collègues Geneviève Gosselin-Fleury et Damien Meslot. Les commissaires à la défense sont scandalisés par tous les volets de cet échec. Ils sont exaspérés de ne toujours rien comprendre à ce qui a pu se passer pour en arriver là. Ils sont admiratifs de la retenue des victimes et de leur sens des responsabilités, qui tranche avec l’incompétence et la légèreté des responsables désignés par les textes, qui ont failli à leur mission. Malheureusement, l’affaire est encore loin d’être close. Avec le recul, l’histoire retiendra le contre-exemple d’une réforme mal conduite de bout en bout. Mais il conviendra rapidement d’en tirer tous les enseignements utiles pour les réformes à venir. La bonne nouvelle, c’est que désormais, les soldes sont versées en temps et heures. Il faut se féliciter de l’action personnelle du ministre en la matière et de l’investissement du personnel affecté à Nancy. Mais remettre l’équivalent en emplois d’un bataillon pour pallier les déficiences d’un système qui devait remplacer la « chaîne solde », quelle ironie ! Nous avons désormais un logiciel et les coûts associés et nous avons recréé un centre territorial d’administration et de comptabilité. Bravo aux initiateurs de ce fiasco. Je note incidemment que le directeur des ressources humaines du ministère de la défense et le secrétaire général pour l’administration de l’époque ont été déchargés de toute responsabilité par le ministre… pour la suite, je crois que le ministre attend un rapport du directeur général des systèmes d’information et de communication du ministère pour se déterminer : soit Louvois est corrigeable et on se lance dans une opération de remédiation. Soit il est incurable et le ministre lancera un autre projet. Le statu quo actuel durera donc encore un peu, de toutes façons.

 

Photo: Patricia Adam (crédits: Assemblée Nationale)

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